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JOURNAL

Ils nous portèrent nos sacs et nous soutinrent nous-mêmes pendant ce difficile trajet. L’officier était un homme assez instruit et intelligent. Aussi, à son étonnement, l’engageai-je dans une conversation sérieuse et extravagante même ; — politique.

Dès le matin, je fus à la fenêtre pour ne pas perdre un seul instant la vue de la campagne de Rome.

Que ne sais-je dire toutes les belles choses qu’elle me fait penser et que tant d’autres ont dites tant de fois et d’une façon si charmante !

J’étais si occupée à reconnaître les lieux !… La tête de notre train était déjà sous le toit vitré de la gare que je cherchais encore le toit peuplé de Saint-Jean de Latran.

L’ambassadrice d’Espagne était là, venue à la rencontre de quelques dames ; j’ai détourné la tête lorsqu’elle me reconnut. J’étais honteuse de venir à Rome… il me semblait qu’on me regardait en… intruse.

Nous descendons au même hôtel, dans le même appartement. Je monte l’escalier et m’appuie sur la boule du coin de la rampe, comme je m’y étais appuyée l’autre soir.

Je jette un regard contrarié à la porte de l’escalier et je viens occuper la chambre de damas rouge… Le croirait-on ? avec la pensée de Pietro.


Mercredi 27 décembre. — Maman parlait de la mort de Rossi. Lorsque cet aimable homard entra en caracolant en arrière.

— Eh bien, dit-il après les premières politesses, ce pauvre Pietro A… a perdu son oncle.

— Oui, le pauvre. Il n’a rien eu ?

— Si, l’argenterie de table.

Ce fut une gaieté générale. Après quoi, avec une fran-