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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

pagne ; la chemise brodée dont on voit le plastron, et un nœud de couleur à la place de la boutonnière.

La femme est en jupe et en veste, pareilles de forme à celle de l’homme, mais d’une étoffe plus douce en couleur. Et sa tête, au lieu d’être coiffée avec des fleurs et des rubans comme celle des filles, est entortillée dans un mouchoir de soie qui cache tous les cheveux et même tout le front, sans couvrir les oreilles ni le cou.

Ils entrèrent au salon, suivis des garçons d’honneur, des filles d’honneur et de ceux qui ont négocié le mariage,

Le mari et la femme s’agenouillèrent à trois reprises devant mon père.


Mercredi 27 septembre. — Je parle avec mon père en riant, ce qui me permet de tout dire. Il a été blessé de ma dernière phrase avant-hier.

Il se plaint, il dit qu’il a mené une vie folle, qu’il s’est amusé ; mais qu’il lui manque quelque chose, qu’il n’est pas heureux…

— De qui es-tu donc amoureux ? demandai-je en riant de son soupir.

— Veux-tu le savoir ?

Et ici, il rougit si fort, qu’il mit ses bras autour de sa tête pour ombrager la figure.

— Je veux, dis !

— De maman.

Et comme sa voix tremblait, je m’émus au point d'éclater de rire pour cacher cette émotion.

— Je savais bien que tu ne me comprendrais pas ! s’écria-t-il.

— Pardon, mais cette passion matrimonialement romanesque te ressemble si peu…