Les locomotives sont chauffées avec du bois, ce qui nous épargne l’horrible saleté du charbon. Je me réveillai toute propre et passai la journée à causer, à dormir et à regarder par la fenêtre notre belle Russie si plate, mais cette campagne rappelle celle de Rome.
À neuf heures et demie il faisait encore clair. Nous avions passé Gatchina, l’ancienne résidence de Paul Ier, si persécuté pendant la vie de sa superbe mère, et enfin nous voilà à Tzarskoë-Selo et dans vingt-cinq minutes à Pétersbourg.
Je suis descendue à l’hôtel Demouth, accompagnée d’un oncle, d’une femme de chambre, d’un nègre suivie d’un nombreux bagage et avec 50 roubles dans la poche. Qu’en dites-vous ?
Pendant que je soupais dans mon salon assez grand, sans tapis et sans peinture au plafond, l’oncle entra.
— Sais-tu qui est ici, qui est chez moi ? demanda-t-il.
— Non, qui ?
— Devinez, princesse.
— Je ne sais pas !
— Paul Issayevitch ; peut-on le faire entrer ?
— Oui, qu’il entre.
Issayevitch est à Pétersbourg avec le général gouverneur de Wilna, M. Albedinsky, celui qui a épousé l’ancienne favorite de l’Empereur.
Il a reçu ma dépêche d’Eydtkühnen au moment de partir. Ne pouvant manquer au service, il avait chargé son ami le comte Mouravieff de venir à ma rencontre. Mais ce comte a été dérangé en vain, attendu que nous avons passé Wilna cette nuit à trois heures, et je dormais comme une bienheureuse.
Qui niera ma bonté, après que j’aurai dit que j’ai été