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JOURNAL

une statue, j’ai d’assez beaux cheveux, j’ai une manière de coquetterie très bonne, je sais me comporter avec les hommes.

Je suis honnête, et jamais je ne donnerai un baiser à un autre homme que mon mari, et je puis me vanter de quoi ne peuvent pas toujours les petites filles de douze à quatorze ans, de n’avoir jamais été embrassée, ni d’avoir embrassé quelqu’un. — Alors une jeune fille qu’il verra au plus haut point de la gloire que peut obtenir une femme, l’aimant d’un amour ferme depuis son enfance, étant honnête et pure, cela l’étonnera, il voudra m’avoir à tout prix, et m’épousera par orgueil. Mais, que dis-je ? pourquoi ne puis-je admettre qu’il peut m’aimer ? Ah ! oui, avec l’aide de Dieu. Dieu m’a fait trouver le moyen d’avoir celui que j’aime… Merci, ô mon Dieu, merci !


Vendredi 14 mars. — Ce matin, j’entends un bruit de voitures dans la rue de France ; je regarde et je vois le duc de H., à quatre chevaux, allant du côté de la promenade. Ô mon Dieu, s’il est ici, il prendra part au tir aux pigeons en avril ; j’irai absolument !

Aujourd’hui j’ai vu encore le duc de H… Personne ne se tient comme lui ; il a l’air tout à fait d’un roi quand il est dans sa voiture.

À la promenade, j’ai vu plusieurs fois G…[1] en noir ; elle est belle, pas tant elle que sa coiffure ; son entourage, est parfait, il n’y manque rien. Tout est

  1. La maîtresse du duc.