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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

dédaigné de très beaux partis. Maman est une demoiselle Babanine. Du côté des Babanine nous sommes de vieille noblesse de province, et grand-papa s’est toujours vanté d’être d’origine Tartare, de la première invasion. Baba Nina sont des mots tartars, moi je m’en moque… Grand-papa était le contemporain de Lermontoff, Poushkine, etc. Il a été Byronien, poète, militaire, lettré. Il a été au Caucase… Il s’est marié très jeune à mademoiselle Julie Cornélius, âgée de quinze ans, très douce et jolie. Ils ont eu neuf enfants, excusez du peu !

Après deux ans de mariage, maman alla vivre chez ses parents avec ses deux enfants. Moi, j’étais toujours avec grand’maman qui m’idolâtrait. Avec grand’maman, il y avait pour m’adorer ma tante, lorsque maman ne l’emmenait pas avec elle. Ma tante plus jeune que maman, mais pas jolie, sacrifiée et se sacrifiant à tout le monde.

En 1870, au mois de mai, nous sommes parties pour l’étranger. Le rêve si longtemps caressé par maman s’est accompli. À Vienne, on resta un mois, se grisant de nouveautés, de beaux magasins et de théâtres. On arriva à Baden-Baden au mois de juin, en pleine saison, en plein luxe, en plein Paris. Voici combien nous étions : Grand-papa, maman, ma tante Romanoff, Dina (ma cousine germaine), Paul et moi, et nous avions avec nous un docteur, cet angélique, incomparable