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berçait et voltigeait en l’air en chantant : O Maria ! En cette façon, el non autrement, il échauffait son pauvre corps.

« C’est pourquoi, à cause de cette sienne façon de faire, l’appelait-on le Fou (Salaün ar Fol ) Et pourtant est-il l’un des plus beaux mignons de la reine des cieux.

« Une fois il fut rencontré par une bande de soldats qui couraient la campagne, lesquels lui demandèrent : Qui vive ? Auxquels il répondit : Je ne suis ni Blois ni Montfort, je suis le serviteur de madame Marie, et vive Marie ! A ces paroles, les soldats se prirent à rire, et le laissèrent aller.

Il mena cette manière de vie trente-neuf ou quarante ans, sans avoir jamais offensé personne. Enfin il tomba malade, et ne voulut pour cela changer de demeure. L’on tient que la sainte Vierge, qui ne manque jamais à ceux qui lui sont fidèles, le consola et récréa merveilleusement de ses aimables visites, s’apparaissant devant lui environnée d’une grande clarté, et accompagnée d’une troupe d’anges.

« Notre pauvre simplique, sentant bien que sa fin approchait, comme une tourterelle, fit résonner l’écho de sa voix, pour marquer que l’hiver de sa vie était passé. Mourant, il répétait encore dévotement le doux nom de Marie ; après cela, il rendit heureusement son âme pure et innocente à Dieu. Son visage, qui en sa vie était tout défait par la pauvreté, parut si beau et si lumineux, qu’il le disputait à la candeur du lis et au vermeil de la rose.

Il fut trouvé mort non loin de la fontaine, près du tronc d’arbre qui avait été sa retraite ; et l’enterrèrent les voisins, sans bruit et sans parade, en ce même lieu.

Et l’on vit un beau lis frais et odoriférant, miraculeusement poussé de son tombeau, portant, écrits sur ses feuilles en lettres d’or, ces deux mots : Ave, Maria.[1] »

Jean IV, duc de Bretagne, fit bâtir sur le bord de la fontaine du pauvre fou du bois, sous l’invocation de Notre Dame du Folgoat, une charmante église qui devint bientôt célèbre par un grand nombre de miracles. Celui qui fait le sujet de la ballade suivante nous a paru un des plus touchants. C’est l’histoire d’une jeune fille faussement accusée d’infanticide.

  1. Le P. Cyrille Pennec, Pèlerinage à Notre-Dame du Folgoat.