Page:Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 2.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.

NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.


Cette dernière strophe, si mélancoliquement discrète, cache une triste vérité que le chanoine de Quimper va se charger de nous révéler en détail.

« Ils quittent la ville, s’acheminant vers Pratanraz (paroisse de Penharz)… où ils font halte et aux environs, où genz de cheval ne pouvoient que bien difficilement et sanz péril les attaquer, et se fiant aussi en leur grande multitude. Et ainsi résolus en ces lieux, qui estoient montagneux, le dimanche quatriesme d’aoust, qui fut quatre jours après leur entrée en la ville de Kemper, ils furent chargez et défaictz, premièrement près du dict Pratanraz ; puis, s’estant ralliez en un grand pré, près la Boixière, sur le chemin du Pont-(l’Abbé), s’entr’encourageant les unz les aultres, font ferme de rechef avec une forte résolution de vaincre ; mais ils furent de rechef défaictz sanz beaucoup de résistance par leurs adversaires, qui estoient enflez par le bon succès de la première rencontre. Il en fut tant tué en ce pré, que, depuis ce temps, le nom de Prad-ar-mil-Gof, c’est-à-dire « pré de mille ventres, » lui est demeuré jusqu’à ce jour[1]. »

L’auteur du récit qu’on vient de lire n’est pas sûr, on l’a vu plus haut, de la date des événements : il les rapporte soit à l’année 1430, soit à 1490 ; le poëte breton les plaçant sous l’épiscopat de Bertrand de Rosmadec, ils doivent remonter, ainsi que le poëme, au commencement et non à la fin du quinzième siècle, car le saint évêque dont il parle, élevé sur le siège de Cornouaille en 1416, mourut en 1446.

M. le comte Jégou du Laz, ce noble et loyal gentilhomme si vénéré des montagnards bretons, joua, il y a quinze ans, le même rôle de pacificateur que Bertrand de Rosmadec dans une circonstance à peu près semblable, dont il sera parlé plus tard.

  1. Histoire de la Ligue en Bretagne, par Moreau, p. 19.