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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.


Il est impossible d’exprimer avec plus de délicatesse un sentiment plus doux. Tous les chants des jeunes paysannes bretonnes {et ils sont nombreux) ont le même caractère de pudique réserve : vous diriez qu’on y sent toujours battre le cœur d’une vierge. Lorsque le sujet s’élève, comme en cette circonstance, et que l’auteur se trouve lié à celui qu’il chante par une communauté d’origine, de langue, de traditions, de souvenirs, d’intérêts et d’affections, résultat du vieil esprit de clan, il s’enveloppe d’ombres discrètes, et le mystère prête à son œuvre un charme nouveau. Mais malheur a qui le trahit ! Alors arrivent par troupeaux ces chercheurs de motifs et de paroles qu’on appelle compositeurs de romances : jugeant l’esprit Français moins pénétrant que celui des paysans bas bretons, ils déchirent tous les voiles dont le chaste poêle a enveloppé sa création virginale ; ils chargent de notes l’harmonieuse plainte qui devait avoir pour unique accompagnement le frôlement du fuseau de la jeune fileuse, et l’imprudent révélateur n’a plus qu’a se frapper la poitrine en répétant ce vers de Virgile, que M. Sainte-Beuve a fait passer avec tant de bonheur et d’art dans la poésie française :


Perditus, ah ! liquidis immisi fontibus apros !

J'ai mis le sanglier dans la claire fontaine,

Amour du peuplier !