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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.


Le jour où le recteur de Bignan reparut dans son bourg, fut pour le pays un jour de fête. Les cloches que l'on avait sauvées de la fonte furent mises en branle ; on accourait du plus loin qu'on apprenait la nouvelle ; chacun le voulait voir, toucher sa soutane, lui baiser les mains. Le bon recteur, attendri jusqu’aux larmes, s’avançait suivi de la foule : son front était pâle, ses joues amaigries, ses cheveux avaient blanchi dans l’exil ; on eût dit un de ces premiers chrétiens sortant des catacombes.

Le lendemain, il chanta la messe. L’église avait été dépavée, les saints décapités ; les murs étaient revêtus d’un enduit verdâtre, et le sol couvert de débris : mais tous les fronts étaient joyeux. Tandis que le prêtre officiait, le vent venait par les vitraux brisés faire frissonner la nappe de l’autel, et agiter sa chevelure blanche ; il portait de vieux ornements : mais il avait le front joyeux comme ses paroissiens ; ceux-ci revoyaient leur père, et leur consolateur ; il retrouvait son Dieu, sa patrie, ses enfants.

M. l’abbé Le Joubioux a consacré une intéressante notice bretonne à la mémoire du saint recteur : on regrette seulement qu’il se soit cru forcé d’obéir à certains préjugés de forme dont la critique a fait justice ; il termine par cette pathétique apostrophe aux paroissiens de l’abbé Nourri à l’élégie duquel il emprunte, avec bonheur, une citation :

« Habitants de Bignan, où est voire pasteur et votre père ? Hélas ! Son corps est loin de vous, mais sa pensée comme son cœur ne vous ont pas quittés !