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LA VALLÉE DE LA MOSELLE

hors de Metz, les deux Lorrains appellent un soldat heureux pour qu’il adjoigne la force à ces glorieux civilisateurs. En même temps ils se rappellent que cette élite proclama toujours la gloire de la France intéressée étroitement à l’intégrité de tous les peuples ; qu’elle exigea un traitement de faveur pour toutes les idées d’outre-Rhin ; qu’elle considérait Strasbourg comme un dépôt de la pensée allemande où devaient s’approvisionner nos laboratoires intellectuels ; Et ils ne trouvent point naïf de croire que par cette compréhension supérieure la France s’élève au plus haut degré dans la hiérarchie des nations et, pour reprendre le langage mystique du grand état-major allemand, demeure le soldat initié de plus près aux desseins de Dieu.

C’est ainsi qu’en sortant du cimetière de Chambière, et d’un grand tumulte du cœur, Sturel et Saint-Phlin associent dans un acte d’élévation les noms illustres de la pensée française aux noms obscurs des petits soldats sur la tombe de qui, tête nue, ils viennent d’unifier leurs intérêts individuels, leur hérédité lorraine, la société française et l’humanité. La tristesse générale de ce paysage asservi fait une magnifique atmosphère à la moralité qui les remplit et qui communique à leur visage la dignité sérieuse de ceux qui, après un deuil, se sentent des responsabilités.

(De Metz à Sierck, 52 kil.)

Le long de la vallée mosellane, très large ici et importante par ses hauts-fourneaux, une route rougeâtre, bordée de poiriers et de pommiers alternés, les mena, sans plus de cahots qu’eût fait une piste de