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Ils prendront en pitié notre longue misère ;
Ils ne laisseront pas les bras tendus en vain,
Toujours les braves gens en guerre avec le pain ;
Ils ne laisseront pas du fond de sa mantille
L’avarice hautaine insulter la guenille ;
Nous n’irons pas toujours comme des chiens honteux,
Le long du vieux marché, sous ses antres bourbeux,
Chercher à nos petits un peu de nourriture :
Nous qui suons le jour et couchons sur la dure,
Qui n’avons ici-bas que la peine et le mal,
Nous n’irons pas toujours mourir à l’hôpital ;
Nos crocs ne seront plus chargés d’étoupes molles,
Viendront les pensers forts et les mâles paroles.
Après avoir eu l’os, nous aurons bien la chair,
Les douceurs du printemps après le vent d’hiver.
Aussi je prends courage, au branle de la rame
Je poursuis plus gaîment le poisson sous la lame,
D’un bras ferme et hardi je lance mes harpons,
Je nage à tous les bords, je plonge à tous les fonds,
Car je sais un beau jour, et sans que rien l’empêche,