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Se baisent sur la bouche en regardant la lune.
Hélas ! Un monstre ailé qui plane dans les airs,
Et dont la lourde faux va sarclant l’univers,
La mort, incessamment coupe toutes ces choses ;
Et femmes et bosquets, oiseaux, touffes de roses,
Belles dames, seigneurs, princes, ducs et marquis,
Elle met tout à bas, même des Médicis,
Elle met tout à bas avant le jour et l’heure ;
Et la stupide oublie, au fond de leur demeure,
Tous les gens de béquille et qui n’en peuvent plus,
Les porteurs de besace et les tristes perclus,
Les catarrheux branlant comme vieille muraille,
Les fiévreux au teint mat qui tremblent sur la paille,
Et les frêles vieillards qui n’ont plus qu’un seul pas
Pour atteindre la tombe et reposer leurs bras.
Tous ont beau l’implorer, elle n’en a point cure,
La mort vole aux palais sans toucher la masure ;
Elle jette à tous vents les plaintes et les voix
De ces corps vermoulus comme d’antiques bois :
La vieille aime à lutter ; c’est un joueur en veine