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jamais de pardon, et cette fille qui mettait son bonheur à ne pas être pardonnée… Les jours passèrent longs, farouches, ulcérés et noirs. Seulement, il en fut un plus désespéré que les autres — et auquel Lasthénie ne s’attendait pas, — et ce fut celui où le tressaillement intérieur que les mères heureuses appellent joyeusement : « le premier coup de talon » de l’enfant qui annonce sa vie et peut-être aussi le mal qu’un jour il fera à sa mère, lui apprit, à la malheureuse, que c’était elle, et non sa mère, qui s’était trompée…

Elles étaient, alors comme toujours, front contre front, dans l’embrasure de leur fenêtre, — occupant leurs mains fiévreuses en travaillant, — dévorées par la même peine muette… Un jour triste, quoique clair et aigu, filtrant comme du vent par un trou, de ce trou de là-haut formé par ces montagnes aux cimes rapprochées, tombait dans cette salle sombre sur leurs nuques, comme une guillotine de lumière.

Tout à coup, Lasthénie mit une de ses mains sur son flanc, en poussant un cri involontaire…, et au cri, et encore plus à l’inex-