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Ô de la puberté la terrible démence !
Qui ne les connut pas ces amours de treize ans ?
Solfatares du cœur qui brûlent en silence,
Embrasements, étouffements !

Je passais tous mes jours à ne regarder qu’elle…
Et le soir, mes deux yeux fermés comme deux bras
L’emportaient, pour ma nuit, au fond de leur prunelle…
Ah ! le regard fait tout, quand le cœur n’ose pas !
Le regard, cet oseur et ce lâche, en ses fièvres,
Sculpte le corps aimé sous la robe à l’écart…
Notre cœur, nos deux mains, et surtout nos deux lèvres,
Nous les mettons dans un regard !

Mais un jour, je les mis ailleurs… et dans ma vie,
Coup de foudre reçu n’a fumé plus longtemps !
C’est quand elle me dit : « Cousin, je vous en prie… »
Car nous étions tous deux familiers et parents ;
Car ce premier amour dont la marque nous reste
Comme l’entaille, hélas ! du carcan reste au cou,
Il semble que le Diable y mêle un goût d’inceste
Pour qu’il soit plus ivre et plus fou !