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qui ont de l’àme et qui en parlèrent, semblèrent des réclamiers. Des réclamiers splendides, il est vrai ! Ils se sont mis sur ce pied d’être splendides, comme on prend des habits de fête pour faire plus d’honneur à quelqu’un. Ils ont même pris leurs accoutrements de gala au vestiaire de Victor Hugo, afin de rendre leur magnificence plus flatteuse. Ils ont mis les culottes de leur Empereur… Ils ont crocheté… son dictionnaire, pour parler de lui avec ses propres mots. Rude tâche que de vouloir parler cette langue qui éventre tout et s’éventre elle-même ! De pauvres diables s’en sont crevés.

Mais moi, qui ne la parle point, et qui, par conséquent, ne crèverai pas, je n’en essaierai pas moins de constater dans la mienne ce qui me frappe en ce tonnant succès des IIIe et IV* volumes de la Légende des Siècles, et ce qui me frappe surtout, c’est que ce fut un succès littéraire, — un succès purement et absolument littéraire. Il ne devait rien, celui-là, aux circonstances qui ont porté souvent Victor Hugo sur tous les pinacles ! L’Empire était tombé. Guernesey loin, dans sa brume et dans son écume. Nous étions bien chez, nous, nous et nos chats ; car nous avons des chats comme Napoléon disait qu’il y en avait aux Tuileries… Le Romantisme, qui avait commencé et même poussé notre fortune, était mieux que mort, il était insulté. II n’y avait plus d’idées à mettre par terre, — elles y étaient toutes… Dans cette table rase de