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II

Ainsi, c’est un Ressuscité qui ne mourra plus, que Ronsard ! Il durera autant que la langue française qui a cru l’avoir fait tuer par son licteur, cette langue française dont il est la jeunesse, avec tous les défauts violents, extravagants, mais ravissants, mais enivrants, de la jeunesse ! Vieille, — quand elle le sera tout à fait, — c’est avec les tremblements de tête d’une adorable vieille émue, quela langue française se retournera encore vers Ronsard, son mâle et impétueux premierné, pour se rajeunir en se baignant dans le souvenir de cette aurore ! Avant qu’on sût bien — nous, du moins, qui ne fûmes pas ses contemporains, — ce qu’il fut en réalité, cet illustre poète d’une époque finie ; avant la savante édition de Prosper Blanchemain, laquelle complète et résume toutes les éditions antérieures, on pouvait croire, et moi-même je l’ai cru longtemps, que Ronsard n’était plus qu’un nom et qu’une date, une de ces comètes qui ne font que passer dans une littérature et dont parlent entre eux les astronomes.

Mais après cette belle édition de Blanchemain, impossible !