moraliste railleur qui a parfois des brutalités atroces, comme dans son sonnet le Te Deum :
O Veuves qui pleurez, ô mères désolées !
Voulez-vous bien sourire et rendre grâce à Dieu.
Comme aussi dans L’Accord parfait, Sacra famés, L’État, L’Expiation, Le Mal suprême et d’autres encore qu’il est impossible d’énumérer dans cette gerbe pressée de poésies qui n’ont qu’un tort à nos yeux, c’est d’être des brins de poésie. L’auteur des Sonnets humouristiques serait à coup sûr un puissant poète, s’il plaçait son imagination et ses qualités dans des milieux plus faits pour elles. Le poète qui a écrit L’Influenza, La Note éternelle, Un soir d’été, La Colombe, L’Ancolie, A Éva, Sur la Montagne, Dans les Bois, Dans la Grotte, Dans les Ruines, Stella, La Canne du Vieux, Abîme sur Abîme, Hermès, ou, pour mieux parler, car il faudrait tout citer, les Cent soixante-douze Sonnets du recueil, qui sont, à bien peu d’exceptions près, presque tous, à leur façon, des chefs-d’œuvre, est certainement plus qu’un artiste de langue et de rhythme, introduisant, à force d’art et de concentration, je ne sais quelle téméraire plastique dans le langage. Il a (regardez-y et même vous n’avez pas besoin d’y regarder pour en être frappé) la fécondité, la force, la profondeur, la grâce, la variété dans l’inspiration et cette unité dans le sentiment qui fait l’originalité d’un homme et qui lui crée son moi poétique, mais dans quelle proportion a-t-il tout cela, si ce n’est dans celle qui étouffe, en le restreignant, le génie, le génie à qui la place est nécessaire et qui ne peut jamais se passer d’horizons !