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nous n’avons pas à y déplorer de malheurs. Quand elle veut tuer son frère pour sa peine de l’avoir vue pâlir, les pistolets n’étaient pas dans les fontes de la selle. Quand elle lève le poignard sur M. X… endormi, — la lune était plus aimable : elle embrassait Endymion, — M. X… se réveille ! Plus tard, il est vrai, elle le menace très-nettement de lui brûler la cervelle, à M. X…, devant d’autres lettres de l’alphabet, mais elle ne la lui brûle point. Elle rapporte d’Amérique, pour l’empoisonner, un poison de première qualité, qui n’est point un vil poison de blanchisseuse, mais c’est elle qui s’empoisonne. Seulement elle prend du contre-poison immédiatement et se sauve ! Il n’y a d’empoisonné que son amour, de sorte que l’en voilà guérie, et que tout le monde sort en bonne santé de ce livre dont on peut dire, comme dans les lettres de faire part : La mère et l’enfant se portent bien !


V


Mais l’enfant mourra… et avant peu ! De pareils livres ne durent pas longtemps. Demandez-vous où est maintenant le Glenarvon contre Byron, et dans quel mépris est tombé Lui et Elle, et toutes les Elles qui ont écrit contre leurs Lui ! Je veux la mort de son péché, mais je ne veux point la mort de la pécheresse qui peut nous écrire autre chose que des pamphlets de cœur. Pamphlets, soufflets, camouflets, sottes choses ! Puisque nous avons de la fierté, il faut laisser tous ces extravasements et ces extravagances, odieux dans d’autres livres où des femmes déshonorent elles et leurs amants pour le seul plaisir de les déshonorer, tandis qu’ici on a au moins pour excuse l’abandon ! — l’abandon dans une société qui a exaspéré toutes les vanités de la femme jusqu’au délire de vouloir devenir des hommes contre les