CHAPITRE VIII
Mme EDGAR QUINET[1]
I
Je m’étais bien promis de ne pas toucher encore à ce sujet…
Je ne le trouvais pas assez froidi, — ni moi non plus — pour y toucher ; — pour juger impartialement cette époque de malheur et de honte que nous avons là traversée… Ce n’est pas quand nous sommes à moitié pris encore, sans être des Titans, sous la montagne qui nous a écrasés, qu’on peut porter un jugement historique sur des événements et des hommes contre lesquels on doit avoir des ressentiments implacables : les ressentiments du mal qu’ils nous ont fait et des humiliations que nous leur devons ! Pour cela il faudrait que le cœur fût devenu du bronze, comme la plume de l’Histoire, qui, dit-on, est de ce métal. Il n’a pas porté bonheur à Tacite lui-même d’avoir exprimé son immortel mépris sur les hommes et les choses dont il fut le contemporain. N’a-t-on pas dit de lui qu’il était un exagérateur, — un journaliste, — un libelliste, une espèce de Juvénal en prose ? N’a-t-on pas dit qu’il avait calomnié Tibère ?… Et tel sera toujours le sort de tout homme qui osera écrire l’histoire de son temps, quand les faits, qui la font,
- ↑ Paris, — Journal du Siège. — Chez Dentu.