Page:Barbey d’Aurevilly - Ce qui ne meurt pas, 1884, 2e éd.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

II

Le château des Saules — qui, dans les temps anciens, ainsi que la plupart des châteaux du Moyen-Âge, avait dû être quelque formidable nid de guerre caché comme une embuscade dans ces marais du Cotentin, alors d’inexpugnables fondrières, mais qui, détruit après les guerres religieuses du seizième siècle, avait été rebâti au commencement du dix-septième et transformé en une demeure spacieuse et pacifique — appartenait en 1845 à la comtesse Yseult de Scudemor, veuve du dernier descendant de la vieille famille normande de ce nom, et dont la vie, fort courte, s’était écoulée hors de France dans les hauts emplois de la diplomatie auprès des cours étrangères.

Cette comtesse de Scudemor, épousée au loin et qui n’était pas du pays, mais qui y avait séjourné avec son mari quelque temps après son mariage, y était revenue avec sa fille depuis plusieurs mois. Par quoi y avait-elle été attirée ?… Le temps qu’elle avait passé là avec son mari avait été trop court pour qu’elle en pût garder un bien profond souvenir… Quand elle avait reparu aux Saules, le monde des châteaux circonvoisins l’avait presque