Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/412

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Et la Pudica ?… — dit presque timidement Rançonnet, qui ne caressait plus son verre.

— Je n’ai plus eu jamais des nouvelles de la Rosalba, dite la Pudica, — répondit Mesnilgrand. — Est-elle morte ? A-t-elle pu vivre encore ? Le chirurgien a-t-il pu aller jusqu’à elle ? Après la surprise d’Alcudia, qui nous fut si fatale, je le cherchai. Je ne le trouvai pas. Il avait disparu, comme tant d’autres, et n’avait pas rejoint les débris de notre régiment décimé.

— Est-ce là tout ? — dit Mautravers. — Et si c’est là tout, voilà une fière histoire ! Tu avais raison, Mesnil, quand tu disais à Sélune que tu lui rendrais, en une fois, la petite monnaie de ses quatre-vingts religieuses violées et jetées dans le puits. Seulement, puisque Rançonnet rêve maintenant derrière son assiette, je reprendrai la question où il l’a laissée : Quelle relation a ton histoire avec tes dévotions à l’église, de l’autre jour ?…

« C’est juste, — dit Mesnilgrand. — Tu m’y fais penser. Voici donc ce qui me reste à dire, à Rançonnet et à toi : j’ai porté plusieurs années, et partout, comme une relique, ce cœur d’enfant dont je doutais ; mais quand, après la catastrophe de Waterloo, il m’a fallu ôter cette ceinture d’officier dans laquelle j’avais espéré de mourir, et que je l’eus porté encore quelques années, ce cœur, — et je t’assure, Mautravers, que