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brun et blond. Ses cheveux bouclaient très noirs et très serrés autour d’un front petit, aux tempes renflées, tandis que sa longue et soyeuse moustache avait le blond fauve et presque jaune de la martre zibeline… Signe (dit-on) de trahison ou de perfidie, qu’une chevelure et une barbe de couleur différente. Traître ? le major l’aurait peut-être été plus tard. Il eût peut-être, comme tant d’autres, trahi l’Empereur ; mais il ne devait pas en avoir le temps. Quand il vint au 8e dragons, il n’était probablement que faux, et encore pas assez pour ne pas en avoir l’air, comme le voulait le vieux malin de Souwarow, qui s’y connaissait… Fut-ce cet air-là qui commença son impopularité parmi ses camarades ? Toujours est-il qu’il devint, en très peu de temps, la bête noire du régiment. Très fat d’une beauté à laquelle j’aurais préféré, moi, bien des laideurs de ma connaissance, il ne semblait être, en somme, comme disent soldatesquement les soldats, qu’un miroir à… à ce que tu viens de nommer, Rançonnet, à propos de la Rosalba. Le major Ydow avait trente-cinq ans. Vous comprenez bien qu’avec cette beauté qui plaît à toutes les femmes, même aux plus fières, — c’est leur infirmité, — le major Ydow avait dû être horriblement gâté par elles et chamarré de tous les vices qu’elles donnent ;