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d’aller plus loin. De l’air d’un homme qui n’a pas la tête saine, il se leva tout d’une pièce, marcha rapidement et bruyamment au travers de ses convives, au risque d’en heurter quelques-uns, demanda un verre d’eau à haute voix, d’un ton brusque, puis se tourna vers le pianiste et le pria de jouer quelque chose ; mais il ne causa que de la surprise et ne troubla que momentanément l’attention qu’on prêtait au conteur. Fasciné, en quelque sorte, par les regards qui semblaient lui demander compte de son tapage, il courba la tête, et revint soucieux, consterné, s’asseoir auprès de son ami, tandis que l’imperturbable juge reprenait :

« Deux années plus tard, une femme plus que sexagénaire, demeurant rue Saint-Jacques, et bien connue aux alentours sous le nom de mère Durand, était étranglée et volée, à trois heures de l’après-midi, dans une chambre qui n’était séparée que par une cloison d’une boutique où l’on venait manger à toute heure du jour.

« La vitrine de la rue n’avait point de rideaux ; du dehors, on voyait le comptoir à gauche, les fourneaux à droite ; plus loin se dressaient les tables. Sur le feu des fourneaux, les marmites exhalaient leurs odeurs habituelles ; des clients attendaient la maîtresse du logis et s’impatientaient de ne pas la voir. Las d’appeler et de frapper les verres de leurs couteaux, deux d’entre eux allèrent questionner l’épicier