Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/59

Cette page n’a pas encore été corrigée

servir avoir reçu un don surnaturel et divin.

Ceci va vous paraître étrange et n’est pourtant que strictement vrai : on n’entend dans un vers que le mot qui est à la rime^ et ce mot est le seul qui travaille à produire l’effet voulu parle poëte. Le rôle des autres mots contenus dans le vers se borne donc à ne pas contrarier l’effet de celui-là et à bien s’harmoniser avec lui, en formant des résonnances variées entre elles, mais de la même couleur générale.

Quoi ! dira-t-on, un mot faire tant de choses, un seul mot! et tout de suite on pensera à la bonne bouffonnerie de Molière dans Le Bourgeois Gentilhomme : COVIELLE. Ossa hinamen sadoc hahalli oracaf ouram, CLÉONTE. Belmen, COVIELLE. II dit que vous alliez vite avec lui vous préparer pour la cérémonie, afin de voir ensuite votre fille, et de conclure le mariage. MONSIEUR JOURDAIN. Tant de choses en deux mots ? COVIELLE. Oui, la langue turque est comme cela^ etc.