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CHAPITRE XI

CONCLUSION


Parmi les lecteurs qui m’ont suivi jusqu’ici, il en est un peut-être, jeune fille ou jeune homme, que Dieu a destiné à devenir un poëte. C’est à cet être désigné et choisi entre tous que j’adresse les paroles suivantes, comme le conseil fraternel qu’on donne à un ami bien cher partant pour un combat incertain et périlleux.


Comme, en somme, ta poésie exprimera ton âme, on y verra se refléter clairement les vices, les faiblesses, les lâchetés et les défaillances de ton âme. Tu tromperas les hommes peut-être, mais non pas ta muse, que ne saurait duper ton hypocrisie. N’est pas poëte celui qui n’a pas le cœur d’un héros et que ne brûlent pas une immense charité et un immense amour. Tout ce que l’égoïsme ronge et détruit de toi, elle le ronge et détruit en même temps de ta poésie.