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Dans l’Ode, fuyez comme la peste la forme didactique , le raisonnement et les phrases incidentes. Il ne faut jamais oublier que l’Ode chantée a servi d’accompagnement à la danse extasiée des Nymphes au bord des sources sacrées, et qu’elle a animé là colère des Ménades, frémissantes de l’amour du dieu. Il y faut toujours une sorte de fureur, et le poëte lyrique peut risquer tout, excepté de s’exposer à être confondu avec M. Prud’homme, « professeur d’écriture, élève de Brard et de Saint-Omer, expert assermenté près les cours et tribunaux[1] ! »

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Tout ce que nous avons dit du Vers isolé, en parlant de l’alexandrin, s’applique également à la Strophe d’ode et à l’Ode prise dans son ensemble, car en effet, pour la composition, une Ode doit être traitée comme un vers isolé. Comme lui, elle doit rassembler tous ses effets à l’endroit voyant, c’est-à-dire aux chutes des strophes et à la chute de l’Ode, — et les autres vers ne doivent être que des préparations, des rappels et des résonnances de ces points mélodiques. Aussi tout l’ensemble de l’Ode — avec ses rimes — doit-il être imaginé à la fois et vu d’un seul coup d’œil !

  1. Scènes populaires, par Henri Monnier.