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Humide de rosée. Un long chapelet gris
Roulait sinistrement dans ses doigts amaigris,
Et son front inspiré, dans une clarté sombre
Pâlissait tristement, plein de lumière et d’ombre !
Mais bientôt je vis luire, en m’approchant plus près
Dans ce divin tableau, sombre comme un cyprès,
Dont mon premier regard n’avait fait qu’une ébauche,
Aux lèvres de l’enfant le doigt de la débauche,
Sur les feuillets du livre une tache de vin.
Et je me dis alors dans mon cœur : C’est en vain
Que par les flots de miel on déguise l’absinthe,
Et l’orgie aux pieds nus par une chose sainte.
Car Dieu, qui ne veut pas de tare à son trésor
Et qui pèse à la fois dans sa balance d’or
Le prince et la fourmi, le brin d’herbe et le trône,
Met la tache éternelle au front de Babylone !


Février 1841.