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                           Daphnis.

Malgré cette fierté dont ton âme est si vaine
Et le sang orgueilleux qui coule dans ta veine,
J’ose te provoquer à la lutte des vers
Au bruit de ce torrent et sous ces arbres verts.
Invoque, si tu veux, les neuf Sœurs du Permesse,
Consacre-leur tes chants et crois à leur promesse ;
Pour moi, j’appellerai la Nymphe au bras nerveux,
Qui près du fleuve aimé tresse ses longs cheveux,
La Naïade qui dort dans son lit de porphyre,
Et celle qui palpite au baiser de Zéphyre !

                           Damète.

Offres-tu quelque gage ou quelque riche don ?

                           Daphnis.

Cette coupe de hêtre où l’art d’Alcimédon
Sut courber sur les bords, par un savoir insigne,
Le lierre pâlissant et l’amoureuse vigne.

                           Damète.

Et moi, cette houlette où son art souverain
Autour des nœuds égaux a fait courir l’airain.

                           Daphnis.

Je vois venir ici Palæmon le vieux pâtre,
Que le dieu Pan lui-même et la nymphe folâtre
Instruisirent jadis à leur métier divin,
Palæmon le bon juge et le sage devin.