Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/102

Cette page n’a pas encore été corrigée

Sur le bahut sculpté la grande Vénus grecque,
Et les in-folios dans la bibliothèque.
  Dire ce qu’éprouva notre Prosper auprès
De tous ces chers bijoux d’enfant, je ne pourrais ;
Surtout lorsqu’il trouva, portant les folles traces
Des anciens jours vécus, ses vieilles paperasses.
Car toute sa jeunesse au riant souvenir
Était dans ces feuillets épars, et revenir
En arrière, c’est vivre une autre fois. La folle
Du logis s’éveillait, et sa blonde parole
Semblait douce à l’enfant comme un zéphyr de mai.
Alors, comme autrefois le héros, enfermé
Près des vierges, frémit au son rauque des armes,
Prosper, sorti plus grand d’un baptême de larmes,
Vers l’azur idéal retrouva son chemin.
Le poëme qu’il fit, tu le liras demain.
Tu verras si toujours intrépide, il s’honore
D’enchanter l’air qui passe avec un mot sonore ;
Tu sauras si le gouffre où ce cœur est tombé
Profondément, au point d’émouvoir la Phoebé,
À laissé surnager quelques flots d’ambroisie,
Car, en somme, il en faut pour toute poésie
Comme pour tout amour. Quelquefois on écrit,
C’est au mieux, que la forme a sauvé son esprit,
Et que, la rime aidant, la Vénus Callipyge,
À mis sa lèvre chaude à ce sang qui se fige.
  D’autres disent tout bas qu’à ses mille revers
Il ajoute celui de se tromper en vers,