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le sang de la coupe

Et toi, qui des combats affrontes les hasards,
À quoi donc t’ont servi tes coursiers et tes dards ?
Ton front, que l’homme craint plus qu’il ne le révère,
N’a pas été lavé par des baisers de mère ;
C’est par une blessure où brilla le sang clair
Que tu jaillis du front de Zeus, comme un éclair,
Et jamais un amant, à l’aurore naissante,
N’a tordu tes cheveux dans sa main frémissante.
Il faut que ton orgueil descende à l’avouer :
Les hommes en retour dédaignent de louer
Celles qui, leur prenant le casque et la cuirasse,
Préparent des festins pour le corbeau vorace.

Mais celle qui chérit mes mystères vantés,
Je lui donne le sens des sages voluptés.
Elle boit à ma coupe, et, sur toute la terre,
Apprend comme aux bosquets de Cypre et de Cythère,
Où j’emplis de soupirs les ombrages discrets,
Tout ce que ma ceinture enferme de secrets !
Et maintenant venez, mes fils aux blondes ailes,
Et vous dont le plumage est blanc, mes colombelles !
Fuyons les cris de rage et les espoirs déçus !
Fendez le sein des airs, et volez au-dessus
Des bois profonds, des mers, des rochers et des syrtes
Vers Cypre bien aimée, où fleurissent les myrtes !

Pallas.

Ô durs affronts, tombés dans des cœurs immortels !
Qui désormais voudra, sur nos tristes autels,