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— Vrai, l’ancien, vous m’autoriseriez à me permettre une licence pareille avec mon respectable caporal ?

— Allons, un temps, deux mouvements ! saute, farceur, et lis couramment.

3 février 1831.
IX.
CHARGES.

Au dernier des rares concerts donnés cet hiver, un beau jeune homme et une femme charmante se trouvaient assis l’un près de l’autre, comme si le hasard les avait réunis pour entendre l’admirable symphonie qu’on exécutait en ce moment. C’était un morceau de Beethoven, partition aussi pleine de charme que d’éclat.

Il y a un moment où tous les instruments s’arrêtent d’un mouvement spontané. L’effet est merveilleux. Vous n’en avez pas idée, si vous ne l’avez pas entendu. C’est un crescendo, crescendo, crescendo… Puis, tout à coup, silence complet.

— Or, cette fois, on entendit distinctement le son d’une petite voix flûtée, qui, prise au dépourvu par le jeu des instruments, modulait distinctement la fin d’une phrase d’amour :

— Tu m’aimeras toujours ?

— Oh ! toujours ! répondit une basse-taille.

Et la symphonie reprit son train.

10 février 1831.
X.
LES BACCHANALES DE 1831.
I.

Si l’on vous avait demandé de mettre seize caricatures sur une seule feuille de papier, d’y exprimer une révolution consommée, d’en indiquer une nouvelle, de n’oublier ni les doctrines ni les personnes qui les représentent, de composer un carnaval politique et de nous faire trembler d’avoir ri,… croiriez-vous la chose possible ?… L’entreprise était difficile ; mais la Caricature se devait à elle-même de dominer la bouffonnerie des rues, celle des affaires publiques et celle des orateurs… Pour réussir, il a suffi de regarder, d’entendre et de copier.

Il y a dans la caricature de Grandville une traduction si vive de l’histoire contemporaine, que l’on croit lire une page où Molière, Juvénal et Tacite ont déposé tour à tour leurs pensées diversement originales.

Où est l’article de journal qui ait plus artistement stigmatisé la politique de notre diplomatie que ce costume de Polonais loué à notre ministère ?