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MATHIEU MAGIS, à part.

Ils me fendent le cœur. Si ça me regardait, je me laisserais peut-être aller ; mais il faut gagner ma commission, la dot de ma fille. (Haut.) Vraiment, je vous aime beaucoup, vous me plaisez…

QUINOLA, à part.

Dire qu’on aurait un procès criminel si on l’étranglait !

FONTANARÈS.

Vous êtes de fer, je serai comme l’acier.

MATHIEU MAGIS.

Qu’est-ce, Monsieur ?

FONTANARÈS.

Vous resterez avec moi, malgré vous.

MATHIEU MAGIS.

Non, je veux mes capitaux, et je ferai plutôt saisir et vendre toute cette ferraille.

FONTANARÈS.

Ah ! vous m’obligez donc à repousser la ruse par la ruse. J’allais loyalement !… Je quitterai, s’il le faut, le droit chemin, à votre exemple. On m’accusera, moi ! car on nous veut parfaits ! Mais j’accepte la calomnie. Encore ce calice à boire ! Vous avez fait un contrat insensé, vous en signerez un autre, ou vous me verrez mettre mon œuvre en mille morceaux, et garder là (il se frappe le cœur) mon secret.

MATHIEU MAGIS.

Ah ! Monsieur, vous ne ferez pas cela. Ce serait un vol, une friponnerie dont est incapable un grand homme.

FONTANARÈS.

Ah ! vous vous armez de ma probité pour assurer le succès d’une monstrueuse injustice !

MATHIEU MAGIS.

Tenez, je ne veux point être dans tout ceci, vous vous entendrez avec don Ramon, un bien galant homme, à qui je vais céder mes droits.

FONTANARÈS.

Don Ramon ?

QUINOLA.

Celui que tout Barcelone vous oppose.

FONTANARÈS.

Après tout, mon dernier problème est résolu. La gloire, la fortune vont enfin ruisseler avec le cours de ma vie.