Page:Bally - Le Langage et la Vie, 1913.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

canto, cantas, cantat, cantamus, cantatis, cantant ;

amo, amas, amat, etc. ;

intro, intras, intrat, etc.

Mais les changements phonétiques, qui ne tiennent aucun compte des catégories grammaticales, ont créé, en ancien français, dans ce type uniforme et commode, des différences inutiles et troublantes de radicaux et de désinences :

chant, chantes, chantet, chantons, chantez, chantent, mais : aim, aimes, aimet, amons, amez, aiment (radical diversifié), et : entre, entres, entret, entrons, entrez, entrent (désinence nouvelle de la 1re singulier).

Heureusement l’analogie (c’est ainsi qu’on désigne la tendance inconsciente à conserver ou recréer ce que les lois phonétiques menacent ou détruisent) a peu à peu effacé ces différences, en unifiant le radical du type aimer (aim, aimons, aimez), puis, en généralisant l’emploi de la première personne du singulier en -e (chante, aime, comme entre). Mais nouveau danger créé par l’usure des mots : les finales tendent à s’amuïr ; la distinction des personnes, confiée aux désinences, devient trouble. La conscience linguistique, flairant le danger, a chargé les