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hension plus malaisée ; le langage va s’intellectualiser d’autant ? On constate en général que, dans une conversation poursuivant un but pratique, les récits, les explications et les descriptions du sujet sont de véritables actions et ne sont pas purement narratives, explicatives ou descriptives ; elles sont des moyens d’arriver au résultat, pas autre chose. Si, par exemple, un patient consulte un médecin à propos d’un accident dont il a été victime, sa relation de l’accident vise uniquement le résultat qu’il veut obtenir : renseigner le médecin en vue d’une prompte guérison. Dans une discussion d’affaires, l’exposé d’un projet est analytique par nécessité, mais inconsciemment on choisit les mots et les tours les plus propres à persuader ou à convaincre ; qu’il n’y ait rien d’affectif ou d’expressif dans cette manière de dire les choses, voilà qui semble impossible.

Ensuite — et c’est là le second point que l’on oublie trop — l’intelligence ordonnatrice qui est à la base de toute compréhension n’est pas enfermée dans les cadres étroits de la raison ; elle ne se manifeste pas forcément par des jugements explicites et des raisonnements enfilés comme les perles d’un collier.

L’intelligence au service de la vie enveloppe