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l’image exacte. Pour un observateur superficiel, elle n’offre rien d’intéressant ; mais, examinez de plus près les procédés employés ; la langue apparaît alors comme une arme que chaque interlocuteur manie en vue de l’action, pour imposer sa pensée personnelle. La langue de la conversation est régie par une rhétorique instinctive et pratique ; elle use, à sa manière, des procédés de l’éloquence, ou, pour mieux dire, c’est à elle que l’éloquence a emprunté ses procédés En effet, pour l’énoncé des moindres choses, il faut que la pensée s’impose par le langage ; il faut que celui-ci se fasse tantôt pénétrant, incisif, énergique, volontaire, tantôt vibrant, passionné, tantôt humble et suppliant, souvent même hypocrite.

Il suffit de se rappeler les tours les plus usuels par lesquels s’exprime un ordre ou une prière, pour se rendre compte de ce caractère du langage Si vous désirez que quelqu’un vienne vers vous, vous ne le dites pas toujours de la même façon ; votre expression se modifiera selon les rapports existant entre vous et la personne interpellée, et surtout selon le degré de résistance ou d’acquiescement que vous prévoyez de sa part ; voici quelques spécimens des formes possibles : Venez !Voulez-vous venir !Ne voulez-vous