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au regard de la logique ; c’est que la logique est un principe d’immobilité, alors que la vie est tout entière élan, poussée, transformation. 2) Notre pensée est essentiellement subjective quand elle est aux prises avec la vie, le moi y imprime partout sa marque, ce qui ne veut pas dire que l’homme soit nécessairement égoïste. 3) Toute pensée dépendante de la vie est affective ; elle l’est d’ailleurs à des degrés très divers. Ce caractère est inséparable du précédent ; l’un peut dominer plus que l’autre ; tantôt l’émotion éclate, tantôt la pensée subjective prend la forme plus intellectuelle d’un jugement de valeur ; devant un Rembrandt, je peux ou bien laisser libre cours à mon admiration et m’écrier : Que c’est beau ! ou bien transformer, par la réflexion, cette émotion en jugement de valeur et dire : C’est un chef-d’œuvre ; mais une même intuition se retrouve à la racine de ces deux formes : rien de ce qui est subjectif ne saurait être dépourvu de nuance émotive ; inversement, tout ce qui est émotif est par là même subjectif.

Écoutez parler autour de vous : dans tous les types d’expression où se révèle une pensée vécue, vous trouverez au moins un minimum d’éléments subjectifs et affectifs ; là même où la langue n’offre pas au sujet parlant des moyens