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REINE D’ARBIEUX

de soleil filtrant dans les vapeurs argentées du ciel annonçait un après-midi de lumière et de pâle azur.

Devant les écoles, il tourna à droite.

Reine était ce matin-là seule dans le salon, assise près du feu. Elle se sentait mieux. Après un temps d’affaiblissement et de prostration, la jeunesse en elle refaisait son œuvre ; ses forces revenaient, elle éprouvait le désir de sortir, de boire un air pur. Mais l’avenir lui paraissait toujours sombre. Elle pensait que sa vie actuelle ne pouvait durer, qu’elle devrait prendre une décision et remettait sans cesse, comme dans l’attente.

Ce matin encore, les yeux fixés sur les flammes qui s’étiraient entre les bûches, elle ne voyait que l’abîme où l’avaient plongée les événements. Ger­main ne lui avait plus donné signe de vie. Il la détestait. L’injure qu’il croyait avoir reçue d’elle était trop cruelle : il la chasserait même de son sou­venir. Elle, au contraire, resterait à lui, ne l’ou­blierait jamais ! Depuis qu’elle savait sa visite à La Renardière, au lendemain de sa fuite, et avec quelle douleur il l’avait cherchée, ses remords s’étaient changés en brûlants regrets. Comment s’était-elle trompée si complètement ? Ce n’était pas vrai qu’elle ne l’aimait pas. Lui seul maintenant occupait son cœur, son esprit, et les exigences mêmes qui, autrefois, l’avaient froissée, lui parais­saient justes. S’il avait fait le vide autour d’eux, c’est que sa présence lui suffisait ; et qu’y avait-il dans ses colères, dans ses violences, sinon les