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REINE D’ARBIEUX

esquissé le geste de la frapper ; et elle reculait la tête lorsqu’il vit une expression de douleur la défigurer.

— Vous l’avez renvoyé, dit-elle, après ce que votre père avait déjà fait… Ah ! vous êtes lâche !

Elle sentit ses doigts s’enfoncer dans son bras. « Oui, répéta-t-elle, aveuglée de larmes mais courageuse, vous aimez à faire du mal. » Comme il la secouait durement, et la frappait au cou, à l’épaule, ses cheveux glissèrent et se répandirent. Puis le salon tourna de nouveau et elle n’eut plus conscience de rien.

Lorsqu’elle reprit connaissance, elle était étendue sur son lit. « C’est assez », dit-elle à Génie qui passait sur son visage un linge mouillé. Elle souffrait de la tête et se retourna contre le mur. Au pied du lit, Germain et la vieille femme parlaient à voix basse.

— Allez-vous-en, implora-t-elle, à plusieurs reprises, d’une voix exténuée, en cachant sa figure dans l’oreiller.

À peine la portière fut-elle retombée que Reine se leva, d’un pas chancelant, et alla verrouiller la porte. Une petite lampe brûlait en veilleuse au coin de la cheminée ; elle la prit, fit monter la flamme, et regarda dans un miroir posé sur la table la marque des coups qui l’avaient meurtrie. Un tumulte affreux de sentiments agitait son cœur. Ah ! pourquoi se trouvait-elle livrée à cet homme dont elle haïssait la brutalité ! Cette scène la libérait des scrupules qui, depuis huit jours,