Page:Balde - Reine d'Arbieux, 1932.pdf/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
102
REINE D’ARBIEUX

la fatigue et l’excitation, ses yeux brillaient, baignés de l’éclat qui décèle un intérêt passionné dans la femme heureuse.

Elle souleva le rideau et vit que Germain avait conduit directement l’auto dans le garage. La pensée lui vint qu’elle aurait dû aller au-devant de lui, mais resta indécise, près de la fenêtre. Génie traversait la route en courant. Un instant après, elle la vit reparaître, retenant par son collier, de toutes ses forces, le chien qui semblait vouloir s’échapper. Germain la suivait, le col dégrafé : il paraissait de mauvaise humeur et parlait d’un ton assez rude. Reine entendit quelques éclats de voix, eut l’impression qu’il la questionnait ; puis tous deux contournèrent la maison, se dirigeant vers la cuisine.

Elle s’était assise au pied de son lit, pensant que Germain viendrait dans sa chambre. Était-ce un contre-coup de ces émotions : un malaise venait de l’étourdir, une sorte de vertige qui, la veille déjà, pendant le dîner, l’avait forcée à quitter la table. Enceinte peut-être ? Elle tressaillit : l’idée de porter un enfant mêlé à sa chair lui causa une sorte d’éblouissement. La vie allait vite. Elle ferma les yeux et savoura cette annonciation, la bouche radieuse.

Son mari l’appelait. Elle baigna son visage dans l’eau et le rejoignit. La porte-fenêtre de la salle à manger était ouverte à deux battants et Germain transportait avec Génie la table sous les marronniers. Il avait la figure brûlante d’un coup de soleil