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faut que vous nous donniez votre adhésion. » Je répondis que je voulais garder ma liberté, acceptant publiquement la responsabilité de mes actes. Alors, il mit en œuvre tous ses moyens de persuasion qui, certes, n’étaient pas médiocres, pour me convaincre qu’il était nécessaire d’opposer un contre-complot aux sombres menées des États qui rendent les peuples malheureux. Et il ajouta : Les réactionnaires sont tous étroitement unis, mais les libéraux sont dispersés et divisés ; c’est pourquoi nous devons organiser une union secrète, internationale.

« Depuis ce moment, le gros serpent m’enlaça de ses anneaux fatals. Je ne pus résister longtemps et déclarai, enfin, que je ferais partie de la Société secrète, si son organisation devait mener immédiatement à la révolution sociale. Je rentrai chez moi à une heure du matin et me couchai, mais en vain essayai-je de m’endormir ! Ces idées nouvelles avaient excité mon cerveau à un tel point que je ne pus rester dans mon lit. Je me levai et, dans mon extrême surexcitation, je me mis à arpenter mes deux pièces qui, dans mon état d’exaltation (furore) me parurent trop exiguës. Je maudissais l’abomination et l’inutilité de la vie que j’avais menée jusqu’alors et je me disais tout haut que mon existence serait encore plus détestable si, avec mes sentiments républicains, voire révolutionnaires, je conservais une heure de plus mon emploi officiel. »

En effet, De Gubernatis renonça à sa chaire et se consacra entièrement à la société de Bakounine. Celui-ci le recommandait aux « frères » comme « le