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que dans le Gouvernement National[1], le parti des blancs a été entièrement battu par les partisans du ruch (insurrection), à la tête desquels est notre ami Smiélinski. Je ne suis pas moins étonné que vous, et de plus très affligé, que le Gouvernement National (probablement lorsque les blancs étaient encore en majorité), ait exclu mon nom en prononçant un anathème contre vous. Jamais de ma vie, fût-ce vis-à-vis des Russes ou des Polonais, je ne dénierai ma solidarité avec vous. Je n’en ai parlé et je n’en parlerai à personne, avant que je n’y sois autorisé par vous. Cependant il ne serait pas inutile de protester de ce titre de « panslavistes » qu’ils nous confèrent. Tu ne l’as jamais été, Herzen, au contraire, tu as toujours regardé le mouvement slave d’un œil dédaigneux. Quant à moi, bien que je n’aie jamais été prosélyte du panslavisme, j’avais pris une part active dans le mouvement slave ; et aujourd’hui encore je garde la conviction que notre avenir sera réalisé par la fédération slave, parce que, seule, elle saura donner dans une forme nouvelle et libre, une satisfaction à ce sentiment de grandeur, toujours vivace chez notre peuple, mais qui infailliblement sera émoussé dans la fausse voie de l’impérialisme que nous suivons. Mais c’est là une question d’avenir encore bien éloigné et il serait puéril de s’adonner aujourd’hui à sa réalisation ; si nous devons songer aux Slaves à présent, ce n’est que pour les détourner d’une alliance avec la Russie actuelle, impérialiste, qui ne peut que leur être funeste. Quant à moi, je n’y pense plus.

Pour le moment, toute la question est concentrée sur la Pologne et sur la Russie. Oui, nous avons de

  1. Rzand narodowy, de l’insurrection polonaise (Trad.)