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incombe aujourd’hui au prolétariat de France. Ils savent que si la France succombe, la cause de l’humanité en Europe sera perdue pour un demi-siècle au moins. Ils savent qu’ils sont responsables du salut de la France, non seule |8 ment vis-à-vis de la France, mais vis-à-vis du monde entier. Ces idées ne sont répandues sans doute que dans les milieux ouvriers les plus avancés, mais tous les ouvriers de France, sans aucune distinction, comprennent instinctivement que l’asservissement de leur pays sous le joug des Prussiens serait la mort pour leurs espérances d’avenir ; et ils sont déterminés à mourir plutôt que de léguer à leurs enfants une existence de misérables esclaves. Ils veulent donc le salut de la France à tout prix et quand même.

La bourgeoisie, ou au moins l’immense majorité de cette classe respectable, veut absolument le contraire. Ce qui lui importe avant tout, c’est la conservation quand même de ses maisons, de ses propriétés et de ses capitaux ; ce n’est pas autant l’intégrité du |7 territoire national, que l’intégrité de ses poches, remplies par le travail du prolétariat par elle exploité sous la protection des lois nationales. Dans son for intérieur et sans oser l’avouer en public, elle veut donc la paix à tout prix, dût-on même l’acheter par l’amoindrissement, par la déchéance et par l’asservissement de la France.

Mais si la bourgeoisie et le prolétariat de France poursuivent des buts non seulement différents, mais