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de 4 % à 22 % en vingt ans ; c’est le crime le plus représenté en prison. Le viol est-il plus répandu qu’avant ou y a-t-il plus de plaintes déposées en ce domaine ? Aucune étude ne permet pour l’heure de trancher. Par ailleurs la paranoïa organisée contre les pédophiles a permis les pires dérives (il semblerait par exemple que l’accusation d’attentat à la pudeur soit très en vogue dans les cas de divorce lorsqu’une femme veut empêcher le père de voir ses enfants). Des histoires d’inceste bâties de bric et de broc sont à l’origine de plus d’un suicide en prison. Dans ces affaires, les juges ne sont pas très regardants, pudeur oblige.

Il se trouve que les délinquants sexuels bénéficient de moins de conditionnelles que les autres[1] or des études criminologiques sur les récidives montrent que 1 à 1,7 % des violeurs seulement sont de nouveau arrêtés et condamnés pour viol[2]. Le propre de ces détenus, c’est qu’ils n’appartiennent pas au milieu de la délinquance, sauf sans doute dans le cas de viol collectif tristement appelé « la tournante », mais tous les autres sont des égarés. Ils tombent dans une fosse où grouillent les reptiles de la honte. C’est elle, qu’ils soient coupables ou non, qui les fait se pendre.

Mais le milieu, le vrai, n’existe plus, celui des voleurs qui avaient toujours été les professionnels de l’illégalité. Car la cambriole est en voie de disparition, les pieds de biche ayant trouvé plus forts qu’eux dans les portes des villas coffre-fort dans lesquelles on ne déniche d’ailleurs plus de sacs d’or ni même de billets. Les antiquaires, grands receleurs devant l’Éternel, se heurtent à des compagnies d’assurances aux méthodes plus dissuasives que celles de toutes les polices réunies.

Donc le vol simple, le cambriolage, comme le recel sont en chute dans les statistiques du ministère de la Justice. Le vol

  1. Anne-Marie Marchetti, dans Perpétuités, op. cit., signale qu’en 1989 par exemple, 36 % des condamnés à plus de 10 ans avaient obtenu la libération conditionnelle mais seulement 24 % des auteurs d’infractions de type sexuel.
  2. A. Kensey et P Tournier, « Le retour en prison », ministère de la Justice, Travaux et documents no 40.