Page:Baker - Insoumission à l'école obligatoire, 2006.djvu/197

Cette page a été validée par deux contributeurs.

et tristes fantaisies. C’est un grand mystère pour moi que la volonté humaine : savoir ce qu’on veut, puis le vouloir, est-ce donc si fou ? Pourquoi partout cette vase épaisse où se débattent et s’enlisent les humains ? Qu’est-ce que c’est que cette incapacité de bâtir une digue ferme à partir de ce qu’on connaît de son idée du bonheur ? Est-ce que tout le monde ne se dit pas un jour ou l’autre : « Quel est mon plus grand désir sur cette terre ? » J’adorerais vivre sur une planète où les gens, enfants et adultes, chercheraient à réaliser leurs rêves. Tu imagines comme ce serait passionnant ?  ! On profiterait des films des uns, des gâteaux des autres, de la philosophie, de la musique, des sciences, des milliards de rêves…

Travaillons à nos rêves, ma chérie !

Je sais bien que ce n’est pas si facile de savoir ce que l’on veut. Cela prend un certain temps. Je t’ai déjà dit qu’étant petite je croyais aimer l’école (il y a bien des bidasses qui aiment l’armée, alors…) ; en fait, j’aimais apprendre (on me disait que je ne pouvais le faire que là ; j’étais si crédule…). Bien des hommes croient aimer leur femme qui n’aiment que d’être un mari. D’autres sont « heureux dans leur travail » qui en réalité ne prennent plaisir qu’à pouvoir s’y montrer conquérants. Oui, c’est difficile de discerner ce que l’on aime véritablement. Peut-être est-ce même absurde de vouloir des gens un minimum de clarté. J’ai des amies qui ont opté pour ce qu’on appelle les crèches ou maternelles sauvages, conscientes qu’elles n’iront pas plus loin mais, disent-elles, « c’est toujours ça que l’école n’aura pas pris ». Voilà qui me semble net, alors que j’ai rencontré des dizaines de gens qui affirmaient avoir déscolarisé une fois pour toutes leur petit de trois ans et ont calé quand les portes de la communale se sont ouvertes, impérieuses.

Finalement, si peu ont pris une vraie décision ! Et parmi ceux qui prétendent avoir été retenus de « décider à la place du gosse », combien ont dit carrément à celui-ci quand il a été à leurs yeux en âge de comprendre : « Je t’ai mis à l’école car je craignais, en ne t’y mettant pas, d’aller contre toi, mais, si un jour tu en as marre d’y aller, si tu t’y ennuies ou que tu en as peur, tu peux la déserter et trouver refuge ici aussi longtemps que tu le voudras » ?


On manque singulièrement d’impertinence ! Quand je pense à ces nouveaux « carnets de santé » qu’on remet aux parents à la maternité où l’on demande au fil des mois si l’enfant est gentil, souriant, obéissant, sociable. Les feuilles sont régulièrement envoyées aux ordinateurs de la