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de n’accuser que trois ou quatre élèves. Je l’accuse de mentir et de mentir sciemment.

« Mais un lycée, ce n’est pas, de toute façon, un musée, alors que c’est un conservatoire, un lieu où passent des adolescents, et il ne sera possible de répondre du matériel cassé que lorsqu’on répondra des élèves qui ont été vidés sous prétexte final de réorientation ; il ne sera possible de répondre du matériel cassé que lorsqu’on répondra des élèves dégoûtés de leur vocation première ; il ne sera sérieusement intéressant de rendre compte du matériel cassé tant qu’on n’aura pas mesuré l’étendue du désastre scolaire.

« Et même, on se moquera encore de nous tant qu’on n’aura pas mesuré l’étendue de tout ce qui était possible, grâce à nous, dans ce lycée.

« En termes juridiques, j’énonce, moi que l’on accuse, qu’il n’y a pas “non-lieu” ; j’énonce que ceux qui nous accusent préfèrent le mensonge de ce simulacre soudain de conseil de discipline à la reconnaissance de leurs responsabilités.

« J’espère, disais-je en commençant, que vous serez à même d’en tenir compte.

« Quant à moi, je m’en tiens là, c’est-à-dire beaucoup plus loin que vous. »

Je connais des cyniques qui ne manquent jamais de répéter que c’est à l’école qu’on apprend à utiliser les mots propres à la critique. C’est manifestement faux. On peut apprendre à réfléchir, c’est vrai, et les élèves de Brie-Comte-Robert ont sans doute fait ensemble ce travail. Peut-être même qu’ils se sont trouvé des professeurs comme alliés. Mais pas dans le cadre scolaire. Ils se sont associés librement, dans la marge.

Ce qui fait le « charme de la vie étudiante », c’est qu’on a le temps de réaliser plein de choses à côté. Quand on dit d’une ville universitaire qu’elle est une ville « vivante », on constate, simplement, qu’elle semble très animée parce que beaucoup de jeunes circulent dans les rues, que les cafés sont ouverts tard le soir, qu’il y a plus de cinémas ou théâtres que dans les cités voisines, bref qu’on s’y distrait des études.

Curieux ce préjugé qui veuille non seulement qu’on apprenne quelque chose à l’école mais surtout qu’on n’apprenne que là. Parce que l’Éducation nationale, malgré ses efforts poussifs, est toujours anachronique, on n’enseigne pas encore aux enfants à « regarder la télévision ». Ça viendra. Comme viendra le temps — on scolarise les petits de plus en plus tôt, et ce dans le monde entier — où on nous jurera qu’on ne peut