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quille, je vais te jeter tout à l’heure ! » Le lièvre se met à rire : « Essaye, mon camarade, essaye ! » Et le lièvre lui donne une volée de coups de fouet. Le couroupas veut le jeter : impossible ! la bride lui coupe la bouche, les coups de fouet l’étourdissent, il est forcé de prendre le galop. Ils passent sous la fenêtre de la fille du roi ; le lièvre lui tire son chapeau.

Le bord de la mer était proche. Le lièvre pousse le couroupas, et, à force de coups, le fait entrer dans l’eau. Le couroupas, qui ne sait pas nager, veut s’arrêter. Impossible ! le lièvre le pousse, le pousse toujours. L’eau passe pardessus sa tête, il agite les bras, il ouvre la bouche pour crier, l’eau entre, il se noie.

Le lièvre retourne à terre. Quand ses habits sont séchés, il va chez la fille du roi et lui dit :

« Ce couroupas que vous savez était une triste monture : je l’ai vendu à une mère houritte. »[1]


  1. C’est un des meilleurs morceaux du répertoire de Lindor. L’invention en est si bien nègre que nous étions tenté d’en attribuer l’honneur à notre bonhomme. Mais voici que notre savant correspondant et ami, le docteur Hugo Schuchardt (Professeur à l’Université de Graz), pour qui nos patois créoles n’ont guère plus de secrets, nous avertit charitablement que notre histoire est faite de trois morceaux