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chargé de sonner la cloche : à huit heures, les enfants entrent en classe, je sonne ; à dix heures, ils sortent, je sonne. Six piastres par mois, la demi-balle de riz, les dohlls et le poisson salé : c’est une bonne place ! Par malheur, je suis obligé de la quitter : mon médecin m’a ordonné un changement d’air, je vais à la campagne. — Eh bien ! compère, puisque tu es obligé de partir, cède-moi ta place. — Je compte partir aujourd’hui même si je trouve quelqu’un pour me remplacer. — Eh bien ! me voilà. — Et toi, si je te mets à ma place, prends bien garde au moins de ne pas manquer l’heure de sonner ! — N’aie pas peur, compère, ce n’est jamais moi qu’on prendra en faute. Donne la corde. » Le lièvre lui remet la corde et lui dit : « Écoute bien : tout à l’heure, dix heures vont sonner à l’église ; écoute bien, et sonne, toi aussi. »

Le lièvre s’en va. Le couroupas est au pied du bois-noir ; il tient la corde, il écoute de toutes ses oreilles. Voilà l’église qui sonne : le couroupas tire sur la corde : rien ! la cloche ne sonne pas. « Maman ! elle est dure, cette cloche ! » Le couroupas se suspend à la corde, il tire, il secoue. Soudain la branche casse, le nid de mouches tombe. Les guêpes, furieuses, sortent du nid, fondent sur le couroupas, lui piquent la figure, les mains, les pieds, les yeux, elles le lardent.