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Comme il voit ouverte la bouche du roi éléphant, il épie le moment où personne ne peut le voir, et saute dans la bouche de l’éléphant. Il entre dans son corps, descend et va manger ses intestins. L’éléphant ne sent rien, sa bouche reste ouverte, il rit, il rit toujours.

Le lièvre est un animal méchant. Quand il a assez mangé de tripes, il se met à ronger le cœur de l’éléphant. Le vieux roi, cette fois, cesse de rire ; il ferme la bouche et meurt.

Lorsque le lièvre a assez mangé, il veut sortir : impossible, la porte est fermée. Que faire ? Il retourne dans les intestins, il s’assied et réfléchit.

Cependant, au dehors, les animaux se sont aperçus que le roi est mort. Il font mine d’être désolés, ils pleurent, ils crient, ils gémissent. Le singe va dire au jeune éléphant qui doit succéder au roi son père : « Sire, pour soulager un peu notre douleur, laissez-nous empailler le corps de votre père avec des herbes odoriférantes, citronnelle, feuilles de fougère, racines de vétiver, faham. Puis nous le porterons au cimetière. Mais, du moins, il mettra plus longtemps à pourrir, et nous pourrons nous consoler un peu ! Quelle perte affreuse nous avons faite ! » Tous les animaux répètent en chœur : « Oui, sire ! oui, sire ! laissez-nous bourrer de bonne paille le corps de votre père. »