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on entre dans une autre. Blanche par ici, par là Marie : un mur les sépare.

Le type ne fut plus un type : il prit un nom, il s’appelait François : François Sonveur. Il la mit dans une petite chambre. Il avait quarante ans. Quarante ans préfèrent à la conquête un bonheur qui est sûr ; quarante ans apprécient d’une compagne ce qu’ils mangent de plaisir sur son corps et aussi ce qu’avec ses doigts elle confectionne de succulent pour la bouche. Elle avait ce corps et ces doigts. De plus, il trouva le cœur de Marie.

Elle pensait : « François, oh non ! tu n’es pas un bel homme ; tu ne sais pas qu’on a des moustaches qui se retroussent ; faute de cheveux, ton crâne n’aurait que faire de cosmétique ; tu viens de la campagne, tu marches par les chemins où l’on s’enfonce dans la boue, cela se voit à tes bottes. Mais tu es bon. Avec ses moustaches et sa raie, Vladimir m’a perdue ; d’Artagnan était fort, mais quel ours ! Toi, d’où j’étais, tu m’as dit : « Sors ». Tu es un brave homme. » On aime un brave homme.

Il pleurait quelquefois. Il était veuf. Il avouait : « Je pense à ma femme. » C’est alors que parlait le cœur de Marie. Ce cœur n’était pas jaloux, il comprenait, François, que tu fusses triste. Il le disait.

Mieux que l’amour. D’abord on est reconnaissante. On sent l’affection parce qu’on embrasse un homme, toujours le même, et plus jamais un autre ; on sent de la pitié parce que cet homme pleure ; on sent surtout de la tendresse parce que vous êtes Marie, qu’il existe dans votre cœur