Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/11

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cette page où l’écrivain explique lui-même, avec foi, ses préoccupations littéraires :

Nous sommes convaincu que l’étude des littératures étrangères est indispensable à notre pays, sinon pour l’enrichir en réalité, du moins pour le compléter, et que dans le rapide mouvement en avant des sociétés modernes, qui s’enferme en soi-même est vaincu d’avance. Or, de toutes les nations de l’Europe, notre belle France est certainement celle qui a le moins souci de ce qui se passe chez sa voisine, dans l'ordre des idées aussi bien que dans l’ordre des faits. Sans doute, sa riche littérature, la première du monde par la sympathie universelle qui s’en dégage, peut suffire, à la rigueur, à ses besoins intellectuels ; mais il est bon, toutefois, de faire de temps en temps une excursion chez l’étranger, ne fût-ce que pour accoutumer son esprit à comprendre ce qu’il y a de plus opposé au génie propre de sa nation. Dilatamini ! ce mot que l’apôtre appliquait à la foi peut trouver tout aussi bien son emploi dans le domaine littéraire. Sur ce terrain aussi il faut se garder de l’étroitesse timide, sur ce terrain aussi — et surtout — il faut ouvrir nos cœurs, élargir nos âmes !… L’ignorance des choses de l’Allemagne, déplorable il y a douze ans, est aujourd’hui absolument funeste, et il y a pour nous véritable péril à pro- longer une pareille situation… L’étude des littératures étrangères serait vaine, d’ailleurs, si elle ne se résorbait pour ainsi dire en enseignements palpables pour ceux qui s’y livrent, et si, à travers les lignes de ces volumes qu’on feuillette, on n’apercevait en traits lumineux la manière de voir, le caractère, l’âme même de la nation qui est l’objet de l’enquête.